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Le monde de Mlle Bou
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21 mars 2009

Rencontres du 3eme type, chapitre I

Aujourd’hui je ne suis pas d’humeur à réfléchir sur les diverses opportunités d’expression que nous offre notre belle langue française, et ce même si j’ai pu cette semaine comprendre encore un peu mieux la différence entre « purge » et « lavement ». J’ai donc décidé de changer de sujet et de revenir sur quelques uns des grands moments de solitude accompagnée que j’ai pu vivre au cours de mes heures de vol de vie professionnelle….

        « Solitude accompagnée », on pourrait à première vue penser que j’ai mis des heures à réfléchir, à suer sang et eau, à pleurer toutes les larmes de mon corps pour aboutir  à cet oxymore plus ou moins original dans l’unique but de soulever un débat et faire réagir les foules, mais en fait non, j’ai choisi cette expression après une mûre réflexion d’environ cinq secondes, je ne sue pas du sang, et si j’ai utilisé un oxymore, et ben j’en ai pas fait exprès. Voilà. Me suis pas pressée le citron, ai pas souffert, ai pas non plus cherché à éveiller les consciences. A ceux qui chercheraient une quelconque réflexion philosophique dans cette expression, débrouillez vous tout seul. C’est dit.

        Si j’ai utilisé « solitude accompagnée », c’est parce c’est ce qui semblait le mieux correspondre à ce que j’ai vais raconter. J’ai déjà brièvement évoqué mes laborieuses heures passées derrière une caisse, mais il se trouve que mon champ d’expertise professionnelle ne s’arrête pas là. J’ai sévi dans plusieurs domaines, et il se trouve qu’à chaque fois j’étais en contact avec des représentants de l’espèce humaine. Bien qu’en contact avec eux, je me suis parfois sentie bien seule, d’où la « solitude accompagnée ».

Tout est dans la méthode

        A l’époque où j’étais caissière, et pendant quelques temps après, j’ai exercé le métier de « répétitrice à domicile » - terme officiel pour dire que je donnais des cours chez les gens.  La « répétitrice à domicile » est à la prof à domicile ce que l’  « hôtesse de caisse » est à la caissière : la même chose.

        Lorsque l’on donne des cours chez les gens, la première étape –après les avoir contactés par téléphone- c’est d’aller chez eux. Quand on habite en ville, pas de problème, un bus, un tram et voilà, mais quand, comme moi, on travaille à la campagne, c’est autre chose. Première galère : trouver LA maison. Généralement planquée au milieu de nulle part entre deux champs ou perdue dans le fin fond d’une forêt, vous mettrez au minimum une demie heure pour atteindre votre but (ce qui vous fait 1 heure aller-retour, je vous conseille donc de donner des cours de 2h si vous ne voulez pas passer plus de temps dans votre voiture qu’avec votre élève). Bien évidemment, mon sens de l’orientation étant ce qu’il est, je me suis perdue un nombre incalculable de fois. Je puis vous assurer que lorsque vous êtes sur un chemin de campagne à un croisement sans aucun panneau à l’horizon, ou que vous vous retrouvez sur une pauvre petite route pleine de brouillard au milieu d’une forêt vers 20h en plein mois de décembre, vous n’êtes pas des plus fières et regrettez amèrement d’avoir regardé « Faîtes entrez l’accusé » spécial tueur en série la veille...

        Si vous arrivez vivant à la maison de votre élève, avant de descendre de votre voiture, sachez que vous entrerez dans l’intimité d’une famille, par conséquent – et que vous soyez en ville ou à la campagne c’est la même chose (du bizarre y en a partout)- préparez vous donc à sourire (pas bêtement, vous êtes quand même censé représenter la sagesse et la culture) en toute circonstance et à faire en sorte de ne paraître ni surprise ni dégoûtée lorsque :

1-Vous vous ferez attaquer par des chiens immenses qui vous mettront par terre ou vous baveront dessus et que leur maître les réprimanderont à coup de «ils sont mignons, non ? Ils sont toujours très affectueux avec les visiteurs »

2-vous verrez dans la salle à manger un meuble en verre avec une magnifique collection de centons spécial Disney/cartes postales du monde entier/ trophées de bowling/fusils de chasse.

3- vous verrez au dessus de la cheminée la photo de mariage des parents prise dans les années 80 (ça c’est le plus dur, c’est comme si on voyait la photo sur leur permis de conduire. Surtout ne pas rigoler, ça serait mal vu).

4- Vous sentirez une horrible odeur de chou provenant de la cuisine qui suit son funeste chemin et commence à empester toute la maison. Si on vous en propose, feignez l’allergie et surtout, surtout, pensez à fermer la porte de la pièce dans laquelle vous allez travailler.

        Une fois cette étape passée, vous aurez enfin à faire à votre victime. Il y a plusieurs types d’élèves/victimes appelez-les comme vous voudrez en fonction de ce que vous en ferez : des motivés qui ont demandé des cours pour progresser (oui oui, ça existe), d’autres qui sont obligés par leurs parents et qui n’en ont rien à secouer,  des cas désespérés et d’autres non. La plupart des élèves  ont été sympas, les parents charmants. Tout comme les journaux qui ne parlent pas des trains qui arrivent à l’heure, je ne parlerais pas de ceux pour qui tout est allé pour le mieux. Quand y a rien à signaler y a rien à signaler (je vous avais quand même prévenus : je ne cherche pas à écrire un essai philosophique, cette phrase d’une stupidité rare n’est qu’une preuve de plus s’il en fallait)…        

Sachez que le plus dur, ce n’est pas l’élève, non, le plus dur, ce sont leurs parents. Avec l’élève c’est facile, on apprend à le connaître et on s’adapte (j’ai dû m’adapter jusqu’à expliquer la grammaire anglaise avec des exemples de Pokémon, traduire des chansons de Mariah Carrey, faire des fiches avec les couleurs préférées des élèves etc.… si ça ce n’est pas une belle abnégation qu’est ce que c’est ? Une perte de temps ??? ), les parents c’est une autre affaire.  Les mères en tout cas, je n’ai eu à faire qu’à des mères d’élèves.

Quand vous êtes face l’une d’elles, une qui vient toutes les 5 minutes pour demander à son fils s’il n’a pas faim, s’il n’a pas soif, qui lui apporte une boîte de mouchoirs dès qu’il éternue (oui oui, j’ai assisté à ça, heureusement que ça ne s’entend pas quand on a envie de pisser, je n’ose imaginer ce qu’elle aurait fait) et qui vient vous voir à la fin du cours en vous disant, étonnée : « je ne comprends pas, mon fils n’est pas du tout autonome », gardez toujours une attitude professionnelle. Ne répondez pas « lâche-lui la grappe et ça ira mieux », non, dîtes-lui « il est jeune, il a juste besoin d’un peu de temps pour murir ».

Quand vous avez à faire à une furie qui ne conçoit pas que sa fille ai une note inférieure à 13, qui considère qu’une moyenne générale de 12 est une catastrophe pour son avenir tout entier et celui de la planète, ne vous énervez pas. Il ne sert à rien de lui répondre « la terre va pas s’arrêter de tourner parce que ta gamine a une note correcte et pas excellente », ni même « veuillez m’excuser mais je crains que vous fassiez un énorme caca nerveux pour rien du tout, pour le bien de votre fille et pour le mien, je vous prierais de vous calmer ou d’aller vous faire enfermer dans un asile », non, même si cette dernière solution n’est pas dénuée de politesse, répondez « c’est juste un petit incident de parcours, ne vous inquiétez pas, nous allons y remédier ».

        Pour information, au cas où ça vous intéresserait, d’un point de vue strictement professionnel, tous les élèves ont le même problème : ils ne savent pas comment travailler. Peu importe la matière, une fois qu’on leur montre une bonne méthode de travail et/ou qu’on leur donne un bon coup de pied dans le derrière avec, en général tout roule, les bonnes notes arrivent et les parents sont à deux doigts d’ériger une statue à votre effigie dans leur jardin…

        J’ai arrêté de donner des cours depuis bientôt un an. J’en garde de bons souvenirs et j’ai appris pas mal de choses et rencontré des familles vraiment sympas. Les moments de solitude accompagnée n’ont cependant pas cessés avec cette activité. Dans mon travail actuel, j’en ai rencontré certains qui valaient le coup d’être vécus. J’y reviendrai plus tard. Pour l’heure, et comme d’habitude parce que je suis toujours polie, je vous souhaite une bonne journée/ soirée.

       

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